L'héritage

Guantanamo, interrogatoires, torture...

(Guantanamo: Photo D Le Du/RFI)

La gestion par l'administration Obama de l'héritage de la "War on terror" de l'époque Bush commence décidément à poser de gros problèmes.

La question des méthodes d'interrogatoire, d'abord. Tout le monde aura compris que c'est le terme "politiquement correct" pour désigner la torture: simulacre de noyade, privation de sommeil, humiliations, et j'en passe.

Dans un premier temps, Barack Obama a promis de faire toute la lumière. Il a autorisé la publication des mémos de la CIA (dont nous avons déjà parlé ici et ). Le message était simple: nous ne nous reconnaissons pas dans ce qui a été fait, nous respecterons désormais les règles. L'idée, donc, c'était de mettre un point final à cette page peu glorieuse de l'histoire américaine.

Il s'est passé tout le contraire. A gauche, et dans les associations de défense des Droits de l'Homme, levée de boucliers: il faut juger ceux qui ont édicté ces régles. Obama n'a pas dit oui, il n'a pas dit non.

A droite, retour sur la scène politique de l'ancien vice président Dick Cheney, celui que l'on présente souvent comme l'architecte de cette politique, et qui, fait incroyablement rare dans l'histoire des Etats-Unis, sort de la réserve que s'imposent habituellement les "ex" pour se répandre dans les médias en expliquant tout le mal qu'il pense de l'actuel gouvernement.

Désormais, le président américain tergiverse, et se contredit lui même. La Justice avait ordonné la publication des photos de sévices infligés aux prisonniers soupçonnés de terrorisme en Irak et en Afghanistan? La Maison Blanche ne s'y opposait pas. Et finalement, Obama refuse. Pour ne pas mettre en danger les soldats, sur les théatres d'opération, dit-il. Fureur à gauche, ricanements à droite sur le thème de "on vous l'avait bien dit"...

(Guantanamo: Photo D Le Du/RFI)

Guantanamo.

Dans les premières heures de sa présidence, Barack Obama avait promis deux choses. Fermer Guantanamo début 2010. Juger les détenus qui doivent l'être selon des procédures plus conformes au droit.

Tout cela est fort mal parti. Fermer Guantanamo, certes, mais que faire des détenus? Ceux qui sont "libérables", la majorité, seront sans doute accueillis par des pays tiers. Mais pour le moment, les pays auxquels on a demandé d'en accueillir ne montrent pas un enthousiasme débordant.

D'autres détenus de Guantanamo sont, soit inculpés, soit en passe de l'être. Il faudra bien les mettre en prison quelque part... Le problème, c'est que dès que l'on évoque la possibilité de les envoyer dans un Etat américain, la levée de boucliers est générale. Pas chez nous.

Et puis, il faudra aussi les juger. Haro sur les commissions militaires, les tribunaux d'exception, a dit dans un premier temps l'administration Obama. Désormais, on spécule ici sur l'annonce prochaine de leur rétablissement. Amendés, améliorés, "ravalés", en quelque sorte, mais rétablis.

Pourquoi? La torture, toujours. Les dossiers d'inculpation, basés sur des aveux ou des témoignages obtenus par des moyens douteux, ne tiendraient pas devant des tribunaux fédéraux. il faudrait tout reprendre à zéro....

Le Wall Street Journal expliquait même, dans son édition de mercredi, que l'administration Obama étudiait la possibilité de placer des suspects de terrorisme en détention sur le sol américain, pour une durée indéfinie et sans procès.

Ce qui serait, évidemment, contraire à toutes les promesses.

L'héritage est empoisonné. Sa gestion apparait désormais bien hésitante.

 

5 Comments

C'est le moins que l'on pouvait attendre de OBAMA qui plus est,est un avocat,donc moins étranger aux questions de droits de l'homme.Les Etas unis d'Ameriques avaient,vers la fin du mandat de Busch et au debut de la présidence OBAMA deux défis:la crise financière et rehausser l'image du pays écornée par les pratiques,pour le moins barbares,et qui étaient devenues la marque de ce que fut,dans les années Clinton encore,la puissance respectuese des valeurs humaines universelles.Quel message OBAMA entend-t-il envoyer aux Hammadjinejad et autres chefs de junte birmane?

Obama nage entre un idéalisme et un pragmatisme qui reste sa vraie marque de fabrique. Son revirement montre les limites de sa volonté de dévoiler tous les secrets sur les tortures orchestrés par les services de renseignements américains.Je n'aimerais pas être à sa place et je veux bien savoir la solution que ces conseillers comptent lui proposer afin que cette affaire ne soit pas la première qui vienne rendre l'une de ces promesses de campagnes. En attendant, j'aimerais avoir une idée sur ce que les agences de renseignements des autres pays occidentaux utilisent comme méthodes d'interrogatoires.

@happy taxpayer: pour autant que je sache, il s'agit essentiellement de photos prises par des soldats sur place; certains affirment qu'ils craignaient qu'on ne les croie pas quand ils raconteraient, au retour, s'ils ne pouvaient pas prouver... Pas sûr qu'ils aient tous été animés de la volonté de témoigner...j'ignore, en revanche, s'il y avait des photos plus "officielles"...

jolies photos donaig, tu as l'oeuil !

La question est aussi que ces séances de torture aient été photographiées. Dans quel but ? pour se donner un moyen de pression sur d'autres prisonniers, pour avoir "un souvenir" ? sait on qui sont les photographes ? Cette question est elle posée ?